dimanche 24 février 2013

R.E.M. - Reckoning



R.E.M. - RECKONING (1984)


Il y a beaucoup à dire sur le background de Reckoning, peut-être plus encore que Murmur. Les chansons reflètent pour la plupart la tristesse des grandes inondations ayant eu lieu en Géorgie cette année-là, et tournent autour du thème de l'eau en général. Stipe parle aussi de noyade, de mauvais temps, bref de thèmes presque toujours aux antipodes de la musique. Celle-ci paraitra plus "évidente" encore que sur l'opus précédent, I.R.S. ayant, malgré le succès de Murmur, mis son grain de sel pour que ce nouvel album sonne plus "commercial". Peter Buck voulait que l'album soit double, au vu du nombre de chansons écrites (vingt-deux), mais ne s'est heurté qu'à des refus catégoriques. Le titre choisi, encore en rapport avec l'eau, est relatif à la position d'un navire en mer. La pochette quant à elle, est tout ce qu'il y a de plus intriguant. C'est un dessin de Stipe à l'origine, confié à un peintre du nom de Howard Finster, mais comme les deux hommes n'ont pas travaillé de manière rapprochée, le groupe a été déçu du résultat final. 

Plus commercial ? Ô rage, ô déception ! Un groupe qui avait pourtant commencé si fort... Ha ha mais non rassurez-vous ! Si c'était bien le désir de la maison de disques I.R.S., le groupe mais aussi ses producteurs Mitch Easter et Don Dixon ont réussi à s'opposer à cette décision, ne lui cédant qu'un mince compromis. Tout en ne trahissant ni Chronic Town, ni Murmur, il est vrai que Reckoning comporte des hymnes plus "évidents" que ses prédécesseurs, à l'image du single porteur, "So. Central Rain". Allusion à ce fameux mauvais temps, la musique est ornée d'un riff de guitare tout ce qu'il y a de plus simple et d'un refrain qui ne l'est pas moins ("I'm sorry... Sorry... Sorry... Sorry"). Le résultat est là, et cette humilité ne fait que rejoindre le propos habituel du groupe, en plus mélodique. "So. Central Rain" est aussi révélateur de cette volonté de mettre en avant le chant de Michael Stipe sur l'ensemble de Reckoning, alors que les choeurs de Mike Mills seront sous-mixés. Parfois, on retrouve cette part de mystère présente pour les deux premiers opus, comme sur "7 Chinese Brothers" -Don Dixon affirmant que sur la cassette où le groupe l'avait enregistrée à l'origine, il n'entendait même pas la voix de Stipe !-, mais globalement, le chant est bien poussé en avant et revient au centre de la musique. C'est aussi vrai sur l'antithèse de ce tube, "Camera", morceau étrangement lent et long de cinq minutes (dédié en fait à un ami disparu) que j'ai souvent banalisé avant de le savourer comme tout le reste de l'album. Notons la coda instrumentale reggae qui n'a strictement rien à voir avec ce morceau, ça fait partie du charme !

Les guitares sont quant à elles toujours aussi "carillonnantes", comme en témoigne "Harborcoat" (et son rythme à la "Shaking Through"), alors que la basse se révèle encore tout aussi importante. On reconnaîtra cependant une présence accrue de la distortion par Peter Buck, de manière toutefois sous-jacente (on est encore loin du futur Monster !) A contrario, les petits effets qui affirmaient l'originalité de Chronic Town et Murmur seront amoindris. On ne note qu'une légère utilisation ça et là comme sur "Harborcoat", d'un accordéon déglingué -en fait l'harmonica de Stipe !- pour un pont très court. La batterie de Bill Berry enfin, est toujours aussi excellente même lorsqu'elle ne fait que marquer les temps comme sur "7 Chinese Brothers" ou l'égayant "Letter Never Sent", où la basse brille également.
 

Avec ces titres, le groupe prouve combien il est capable de fixer des musiques lumineuses sur des paroles sombres. Un autre exemple principal reste ce "(Don't Go Back to) Rockville" tubesque à souhait, et qui a bien failli ne pas se retrouver sur l'album. La chanson datait en fait des premiers concerts du groupe en 1980, et il ne voulait en faire qu'un single post-Reckoning, mais lui a donné au final une touche country inédite, par respect pour son "conseiller" Bertis Downs IV. Une perle, tout comme le plus rentre-dedans "Pretty Persuasion", lancé sur un rythme similaire. "Second Guessing" possède quant à elle, à l'instar de "So. Central Rain", un refrain "fainéant" à base de "ouuuuuh", mais c'est encore une réussite. "Little America" n'est, contrairement à ce que font croire les premières écoutes, pas "le titre supplémentaire" : les notes aigües de guitare en particulier, sont un vrai bonheur. Quant à "Time After Time", l'autre morceau lent de l'opus, c'est un tube d'essence acoustique, agrémenté de petites percussions et d'un genre d'autoharpe faisant ressortir la couleur limpide (aquatique ?). Chanson de rêve...

Plus évident que son prédécesseur mais pas moins remarquable pour son unité, Reckoning est l'album qui vaudra à R.E.M. d'être qualifié à l'époque comme l'un des "most beautifully exciting groups on the planet" ! (Marco Stivell - FP).



TRACKLIST :

A1Harborcoat3:51
A27 Chinese Brothers4:15
A3So. Central Rain3:11
A4Pretty Persuasion3:53
A5Time After Time (Ann Elise)3:39
B1Second Guessing2:50
B2Letter Never Sent2:57
B3Camera5:21
B4(Don't Go Back To) Rockville4:34
B5Little America2:56






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