jeudi 27 février 2014

Asia - Asia



ASIA - ASIA (1982)
Geffen - 85577 - (Netherland)

Le mot « Asia » (dans le registre musical) vous évoque-t-il quelque chose ? Non ? C’est en réalité assez normal, puisqu’il s’agit d’un groupe de Rock assez méconnu, formé en 1981 par des artistes issus de plusieurs groupes de bonne réputation dans les années 70, à savoir : Yes, ELP et King Crimson. Pourquoi méconnu alors ? Parce que si les deux premiers albums d’Asia eurent un immense succès au début des années 80, ce ne fut pas le cas du troisième (et des suivants), ce qui contribua à faire tomber définitivement les britanniques dans l’oubli. Le groupe existe cependant toujours et a sorti son dernier album « Phoenix » récemment, sur lequel je ne me suis pas penché, pour être honnête ; puisqu’à mon sens (et à celui de tous les fans), aucun effort des rockeurs n’a réussi et ne réussira à surpasser leur premier disque, l’album éponyme « Asia ».

L’adoration que les fans portent à cette galette est due au style du groupe. Du Rock FM frais, simple, léger et surtout extrêmement agréable. En effet, l’album oscille entre de véritables hymnes Rock, des moments de douceur incomparables et des passages Hard FM tout à fait jouissifs, le tout renforcé par des envolées épiques et des instrumentaux mélodiques et dansants, agrémentés de claviers divins (bon, ce n’est pas sans quelques exagérations). On appréciera aussi la diversité des instruments utilisés : de la trompette à l’orgue, en passant par le saxophone, etc...

Si cette chronique élogieuse vous donne envie de jeter une oreille sur « Asia », vous serez frappés à coup sûr par la modernité de la musique, qui n’a pas vieilli d’un cheveu ! Bientôt 30 ans après sa parution, l’album procure toujours la même satisfaction à l’écoute. Un bonheur transmis grâce à tous les ingrédients cités précédemment, mais aussi et surtout grâce à un interprète exceptionnel : j’ai nommé John Wetton, qui se montre magistral tout au long de l’album, par sa voix douce, fraîche et parfaitement maîtrisée, renforcée sur la plupart des refrains par des chœurs qui donneront une dimension profonde à chaque pièce.

L’album (pour s’y intéresser de plus près) s’ouvre logiquement sur « Heat Of The Moment », le hit d’Asia, qui avait rencontré un immense succès lors de sa sortie. Un succès finalement assez étonnant puisque « Heat Of The Moment » est la chanson du disque qui a le moins de carrure, le moins de prestance. Oui, malgré un couplet assez enjoué et un refrain tubesque porté par quelques notes de synthé, cette chanson n’est qu’un single gentillet et dispensable.

Tous les autres morceaux en revanche, ont plus d’ambition. Aucun d’entre eux ne fait moins de 4 minutes, et ils sont tous dotés de parties instrumentales inspirées et variées. On pourra citer en exemple le classique « Sole Survivor », porté par l’omniprésence du clavier qui donne au morceau son ton aérien. On notera la présence d’un break fort bien fait qui alterne flûte enchanteresse et solo guitare/clavier…
Chaque morceau a une caractéristique qui lui est propre, la lassitude ne pointe donc jamais le bout de son nez, et nous laisse profiter des mélodies imparables et des qualités indéniables de chaque composition. Par exemple, le morceau « Time Again » possède un feeling évident qui le fait se démarquer. « Cutting It Fine », titre qui se présente comme entraînant et accrocheur, débouche sans crier garde sur une longue partie instrumentale entamée par un piano intimiste, puis renforcée par une orchestration élégante et virtuose. Un moment épique et solennel ; du pur bonheur ! L’album se ferme sur « Here Comes The Feeling », un hymne Rock efficace, au refrain bien fédérateur.
Niveau ballades, on appréciera « Without You », une petite perle de douceur, où chaque instrument est mis en valeur avec une finesse remarquable. Le titre « One Step Closer » est cependant très en-dessous du niveau général, parce qu’il se révèle vite assez agaçant.

Cet écart pardonnable sera éclipsé par la présence de deux chefs-d’œuvres, deux titres majeurs de l’album et du groupe. Je pense d’abord au fameux « Only Time Will Tell », qui sonne comme un rêve, à travers une intro épique aux trompettes synthétiques, un air charmant et un refrain grandiose appuyé par des chœurs solides. La perfection sera de nouveau frôlée plus tard dans l’album par le morceau « Wildest Dreams », qui fera apparaître le talent de composition du groupe dans toute sa splendeur. Un morceau magistral.

Dans ces conditions, comment ne pas offrir à « Asia » la note maximale ? Comment ne pas céder aux britanniques une place dans le panthéon des grands groupes des années 80 ? C’est tout simplement impensable…

« Asia » est un chef d’œuvre, une référence du genre, un grand disque mais surtout la manifestation d’une grandeur qu’Asia ne parviendra jamais à retrouver, mais qui ouvrira au groupe les portes de la cour des grands du Rock, atteinte grâce à un talent et une modernité uniques. (Kid66 - FP).


TRACKLIST:

A1Heat Of The Moment3:50
A2Only Time Will Tell4:44
A3Sole Survivor4:48
A4One Step Closer4:16
A5Time Again4:45
B1Wildest Dreams5:10
B2Without You5:04
B3Cutting It Fine5:35
B4Here Comes The Feeling5:42







Ultravox - Vienna



ULTRAVOX - VIENNA (1980)
Chrysalis - CHR1296 - (France)

L'arrivée du maniéré Midge Ure, excellent musicien, allait changer la donne chez Ultravox, qui allait dès lors entrer de plein pied dans les années 80 en étant tout simplement l'un des principaux instigateurs du son de cette décennie.

Sur la pochette, en noir et blanc, on peut voir les membres du groupe en costard, prendrent une pose statufiée. On est loin, très loin, de l'esprit punk des débuts. Sur Vienna, ce groupe anglais en tout point novateur, allait prendre une direction nouvelle pour s'orienter vers une abstraction de plus ou plus tournée vers le synthétique, de manière à déployer un univers glacé, glamour et volontairement lisse.

La perfection instrumentale (et surtout celle du son et de la production, pour une fois travaillée) se met au service d'un refus du chaos et d'une volonté de dépeindre au mieux une certaine lassitude devant les efforts déployés à vouloir changer le monde. C'est un détour du réel et de la gravité qui lui est lié, qui poussera Ultravox à adopter une démarche volontairement dévolue à épouser au mieux leur élan poétique et réveur. 

Les guitares, tranchantes et cosmiques, s'associent à des claviers omniprésents, et qui ont beaucoup vieillis, et une rythmique carrée, dans le but de recréer un monde totalement artificiel, derrière lequel les êtres trop sensibles pourraient se retrancher. Par moment, les délires kitchs semblent ridicules (l'instrumental "Astradyne" ou "Sleepwalk"), à d'autres une enivrante sensation de douceur artificielle et d'évasion envahit l'écoute ("Mr X", absolument robotique et saisissant). Le lyrisme est poussé à son paroxysme, sublimant l'imagerie associé au mouvement néo-romantique (Duran Duran, Spandeau Ballet), dont Ultravox se faisait alors les principaux hérauts. 

L'image et l'apparence seront primordiaux dans l'esprit de ce mouvement, notamment pour dénoncer la violence du monde, et pour la détourner en se complaisant dans un univers chimérique, rempli de magnifiscences déshumanisées. Le look sera soigné, recréant des sortes de beautés de papier glacé, costard blanc, mascara, broshing et air efféminé, seront de rigueur. La tristesse de ne jamais arriver à cette perfection de monde-machine, vaudra au groupe de signer les plus belles dépositions romantiques de l'époque, à savoir le piano de "Private Lines" ou bien le magnifique "Western Promise", et ses langueurs arabisantes, à base de samples électroniques.

Mais là, où certainement, le groupe arrive le mieux à sublimer cette douce et destabilisante tristesse qui caractérise tout romantique, lorsqu'il mesure le fossé qui le sépare de ses idéaux innacessibles, c'est au cours de la chanson "Vienna", prenant, magnifique, pièce maîtresse de l'album, avec ses coups sourds, à la batterie comme à la basse, jouée comme s'il s'agissait d'une boite à rythme, appuyés par un piano ténébreux, jusqu'à l'éclosion de ce refrain déchirant où tout le despespoir explose.

Epoustouflant. Vienna, est une curiosité à redécouvrir, d'une part pour ce qu'il symbolise, dans l'époque et l'emphase pompier que pouvaient atteindre certains groupes des années 80, et d'autre part pour sa quête éperdue d'une esthétique qu'on ne retrouvera jamais. (Vic).



TRACKLIST:


A1Astradyne7:07
A2New Europeans4:00
A3Private Lives4:06
A4Passing Strangers3:49
A5Sleepwalk3:10
B1Mr. X6:33
B2Western Promise5:44
B3Vienna4:52
B4All Stood Still4:23







dimanche 23 février 2014

H.F. Thiéfaine - Dernières Balises Avant Mutation



H.F. THIEFAINE - DERNIERES BALISES AVANT MUTATION (1981)
Masq/Sterne - STE 26515 - (France)


Ce disque, fait l'effet d'une bombe. Surtout si on découvre les albums d'Hubert-Félix Thiéfaine par ordre chronologique. En effet, le disque précédent du Jurassien (il est né à Dôle), De L'Amour, De L'Art Ou Du Cochon ?, est si différent (les deux précédents aussi, car Dernières Balises (Avant Mutation) est son quatrième) qu'on se demande si c'est bien le même mec qui est l'auteur de tous ces disques. Avec Dernières Balises (Avant Mutation), HFT pose définitivement les bases de son univers. A l'évidence, c'est l'album précédent qui aurait du s'appeler ainsi, tant il posait les dernières balises avant la mutation musicale (mais physique aussi, car Thiéfaine s'est coupé les tifs et la moustache, et il ne changera plus de look dès lors) du chanteur.


Ici, c'est pop, rock, rempli de classiques, en 37 minutes seulement. L'album se vendra super bien (le suivant aussi), mais je ne suis pas certain que des singles sortiront pour autant. C'est l'heure de gloire commerciale de Thiéfaine, qui sortira l'année suivante un disque du même tonneau (Soleil Cherche Futur, qui est même supérieur) et, encore un an plus tard, un double live anthologique. Mais revenons à l'album de 1981, sorti sous une pochette représentant une petite fille craquante, en train de fumer, une bouteille d'alcool fort non loin d'elle, dans un décor de favela immonde, et en tenue de prostip*te (au dos, une autre fille, ou la même car elle lui ressemble, en tenue de fée asiatique, tenant un coeur sanguinolent dans ses petites mains, une seringue plantée dedans ; ambiance !).


L'album est terriblement attachant, il offre de pures merveilles. Comment résister à l'intro de "113ème Cigarette Sans Dormir", qui est aussi l'intro de l'album par ailleurs (ben oui, regardez le tracklisting plus bas) ? Ces paroles engagées, assez grandioses, parfois choquantes (Manipulez-vous dans la haine/Dépeçez-vous dans la joie/Le crapaud qui gueulait 'je t'aime'/A fini planté sur une croix). Niveau vocal, Thiéfaine a trouvé, aussi, ses bases. Il chante mieux. Et musicalement, c'est Byzance, Shangri-La, Eldorado, tout ce que vous voulez (non pas que, musicalement, les précédents albums étaient, pour réutiliser la métaphore géographique, Saint-Locdu-le-Vieux ou la Pologne, mais c'est vraiment différent, et meilleur). Autres classiques, "Mathématiques Souterraines", le sexuel "Cabaret Sainte Lilith" (immédiatement précédé d'un "Scènes De Panique Tranquille" angoissant et amusant qui ouvrait la face B), "Exil Sur Planète-Fantôme" ou le bluesy "Taxiphonant D'Un Pack De Kro".


Les titres des chansons sont, encore une fois, alambiqués ("Taxiphonant D'Un Pack De Kro" est un bon jeu de mots, mais la précision du nombre de cigarettes sans dormir pour le titre de la première chanson est franchement assez ridicule et tordu). Mais il faut prendre l'habitude, ça sera toujours comme ça avec Thiéfaine, un mec à l'univers assez particulier, personnel. Si certaines des paroles de "Une Fille Au Rhésus Négatif" me gênent (il y est question de nazisme, les bébés tombent du lit en lisant Mein Kampf, sans parler du refrain, où il est question d'un bébé s'ouvrant les veines, bof), musicalement, c'est encore une fois réussi.


Dans l'ensemble, cet album est une pure merveille, même si les deux suivants (Soleil Cherche Futur et le sombre et cold-wave Alambic/Sortie Sud) sont supérieur. Mais Dernières Balises (Avant Mutation) a quand même une bonne place dans le classement des meilleurs albums français de ces 40 dernières années, et ça, c'est pas rien ! (Clash Doherty - Deep Music).



TRACKLIST:

A1. 113ème Cigarette Sans Dormir
A2. Narcisse 81
A3. Mathématiques Souterraines
A4. Taxiphonant D'Un Pack De Kro

B1. Scènes De Panique Tranquille
B2. Cabaret Sainte-Lilith
B3. Photographie-Tendresse
B4. Une Fille Au Rhésus Négatif
B5. Exil Sur Planète-Fantôme
B6. Redescente Climatisée






vendredi 21 février 2014

Siouxsie & The Banshees - Hyaena



SIOUXSIE & THE BANSHEES - HYAENA (1984)
Wonderland - SHE HP1 - (United Kingdom)

Après le départ du génial guitariste John McGeoch, Siouxsie And The Banshees s'est adjoint les services de Robert Smith, qui avait déjà joué avec eux lors de leur tournée de 1979 (The Cure assurant la première partie du groupe). Siouxsie a plus tard renié l'influence de Robert Smith dans la genèse de Hyaena. Pourtant, il est clair que le guitariste est pour beaucoup dans ce son, qui rappelle ce que fera juste après The Cure avec The Top. L'album est produit par les Banshees et par l'ingénieur du son Mike Hedges (The Cure, The Associates, The Undertones...), qui avait déjà produit le premier album des Creatures et le live Nocturne.

Hyaena a la lourde tache de succéder à la magnifique trilogie avec McGeoch, et on ne peut pas dire que l'album soit à la hauteur. Certes, Hyaena est tout de même excellent, mais moins bon que les trois albums d'avant.

Le single "Dazzle" s'ouvre par des cordes, c'est un magnifique morceau qui rappelle ce que les Banshees étaient capables de faire à leur apogée.

"We Hunger" rappelle également cette période, avec sa batterie tribale et ses montées/descentes. "Take Me Back" sonne presque reggae, avec un riff d'orgue mémorable. "Belladonna" sonne un peu comme de l'auto parodie. Un bon morceau, mais pas excellent. "Swimming Horses", second single, est en revanche grandiose, avec un chant bouleversant, une partie de piano stupéfiante et de très belles, quoique discrètes, guitares. "Bring Me The Head Of The Preacher Man" est un excellent morceau, orientalisant à souhait, avec une guitare acoustique qui tisse de complexes arabesques. "Running Town" est un très bon morceau, représentatif du reste de l'album, mais qui évoque aussi ce que The Cure fera par la suite. "Pointing Bone" est un bon morceau, mais là encore le groupe a tendance à tomber dans l'auto parodie. "Blow The House Down" est plus original, notamment de par sa construction.

Le grand reproche que je ferais à cet album est que les guitares sont trop en retrait, et un peu trop maigrelettes (défaut qui sera corrigé en live). Est-ce la faute à la production ou à Robert Smith ? (Gaylord).



TRACKLIST:


A1Dazzle5:31
A2We Hunger3:30
A3Take Me Back3:05
A4Belladonna4:30
A5Swimming Horses4:05
B1Bring Me The Head Of The Preacher Man4:37
B2Running Town4:02
B3Pointing Bone3:49
B4Blow The House Down7:03







samedi 15 février 2014

Eric Clapton - 461 Ocean Boulevard



ERIC CLAPTON - 461 OCEAN BOULEVARD (1974)
RSO - 2479 138 - (France)

461 Ocean Boulevard, l'album qui a véritablement lancé la carrière solo de Clapton en 1974, est surtout connu pour le tube "I Shot the Sheriff", reprise de Bob Marley. Beaucoup d'Américains n'avaient jamais entendu les rythmes du reggae. Mais cet album est également plein d'émotions, notamment sur deux compositions de Clapton, le religieux "Give Me Strength" et le suppliant "Let It Grow". Le guitariste reste dans son domaine du blues avec ses propres versions de "Steady Rollin' Man" de Robert Johnson et "I Can't Hold Out" de Elmore James. L'album renferme également une reprise du standard de Johnny Otis "Willie And The Hand Jive". Et Clapton transforme le classique "Motherless Children" en concert de guitares rageuses. Après une période de retrait à l'ombre, 461 Ocean Boulevard marquait le retour en force de Clapton.


TRACKLIST:
A1Motherless Children4:55
A2Give Me Strength2:51
A3Willie And The Hand Jive3:46
A4Get Ready3:50
A5I Shot The Sheriff4:30
B1I Can't Hold Out4:10
B2Please Be With Me3:25
B3Let It Grow4:57
B4Steady Rollin' Man3:14
B5Mainline Florida4:05






mercredi 12 février 2014

Simply Red - Men And Women



SIMPLY RED - MEN AND WOMEN (1987)
Wea - WE381 - (France)

En mars 1987, "The right thing" se classe N°11 en Grande-Bretagne. Ce titre est un extrait du deuxième album de Simply Red, "MEN AND WOMEN" qui paraît au même moment. Il a été produit par Alex Sadkin et enregistré avec l'apport de deux nouveaux musiciens : le saxophoniste Ian Kirkham et la chanteuse Janette Sewell. Cette même année, Mick Hucknall réalisera un de ses rêves en chantant en duo avec Ben E. King lors de la cérémonie des Grammy Awards.

Mick Hucknall considère l'héritage soul comme "un point de repère très fiable et une source d'inspiration intarissable, à partir de laquelle on peut développer une dynamique novatrice."

Sur l'album "Men and women", on trouve des reprises de Cole Porter, de Sly Stone et de Bunny Wailer, ainsi que plusieurs inédits. Deux d'entre eux, "Suffer" et "Infidelity", ont été écrits avec Lamont Dozier, une des légendes de la grande époque de Tamla Motown. Excellent opus !


TRACKLIST :


A1The Right Thing
A2Infidelity
A3Suffer
A4I Won't Feel Bad
A5Ev'ry Time We Say Goodbye
B1Let Me Have It All
B2Love Fire
B3Move On Out
B4Shine
B5Maybe Someday...







King Crimson - USA



KING CRIMSON - USA (1975)
Polydor - 2310 523 - (France)

En 1974, KING CRIMSON est mort, la tête haute avec Red, sommet de noirceur et de désespoir. Et du coup, c'est l'heure de faire les comptes : un groupe majeur d'un style qu'il a «officiellement» créé - j'insiste sur les guillemets -, des albums studio plus intéressants les uns que les autres (surtout Lizard, Larks' Tongues In Aspic et Red), un live atroce (Earthbound), aucune compilation et l'image d'un groupe parti avant que le rock progressif ne déraille. Revenons sur ce live raté, d'ailleurs. La performance du groupe était sans aucun doute géniale, mais l’enregistrement était digne d'un bootleg de mauvaise qualité, ce qui n'est pas à l'avantage d'un groupe vraiment exceptionnel en concert. Robert Fripp laisse donc la maison de disques publier un nouvel album live, et de bonne qualité, qui plus est : il s'agit de laisser une trace du crimso' de 1973-1974, et de ne pas laisser les fans sur leur faim en ce qui concerne les albums live.

Sorti en 1975, l'album propose donc des titres joués en live lors de la tournée promotionnelle de Starless And Bible Black à Asbury Park et Providence, d'où le nom de l'album. Et là où je hurle, c'est qu'en plus des enregistrements live, des overdubs de piano et violon ont été rajoutés au mixage ! Certes, c'est le grand Eddie Jobson (ROXY MUSIC, UK) qui s'en charge, mais ça n'excuse en rien cette décision ! Mais bon, passons là-dessus et apprécions l'album. Des choix ont dû être faits, puisque l'album est simple, mais à part Lament, comment se plaindre ? La moitié de Larks' Tongues In Aspic est présente, ainsi qu'une impro et – c'est inévitable à cette époque – le fameux "21th Century Schizoid Man" (le seul enregistré à Providence, d'ailleurs). Il ne faut pas non plus oublier l'intro extraite de (NO PUSSYFOOTING), l'album issu de la collaboration entre Fripp et Brian Eno, le génie de l'ambient.

Quant à leur interprétation, elle est de haute volée, avec des musiciens à la hauteur des espérances, les titres ne s'écoutent pas avec douleur en concert alors qu'en studio c'est génial. Mais le roi ne nous ménage pas. En effet, sitôt le court morceau d'intro joué, le groupe commence direct avec "Larks' Tongues In Aspic Part II", dont la réputation n'est clairement plus à faire : l'interprétation est brute, sanglante et sans concession; il se calme avec "Lament", que je n'ai jamais aimé et qui ne trouve pas plus grâce à mes yeux ici, clairement, c'est le point noir du disque, son remplacement par un autre titre issu de Starless And Bible Black semble une évidence. En revanche, "21th Century Schizoid Man" et surtout "Exiles" sont quant à eux magnifiés en concert : sur le premier, les musiciens se déchaînent comme pas permis, le violon de David Cross est nettement supérieur au saxophone d'Ian McDonald, et le deuxième se dote d'une intro plus efficace et chargée émotionnellement que sa version studio. Les fans du crimso' adorent, les autres ne peuvent rester insensibles au violon triste et à la voix sublime de John Wetton. On n'oubliera pas "Asbury Park", impro déjantée avec l'incroyable break de Bill Bruford pour ouvrir un morceau qui, s'il n'atteint pas toutefois la grande qualité des impros de Starless And Bible Black, reste énorme. Seul regret, le mixage défavorisant Cross.

J'aimerais maintenant revenir sur "21th Century Schizoid Man", ou plutôt sur sa position : en effet, il se trouve en dernière position (les possesseurs du vinyle confirmeront), ce qui confère une charge symbolique importante au disque, puisqu'il s'agit du premier morceau de In The Court Of The Crimson King, et en remontant plus loin, ce fut le premier morceau joué par le groupe. Il s'agit donc d'un signe fort, Robert Fripp ayant donc décidé de finir par le commencement. Bien joué.

USA est donc le dernier ouvrage original de KING CRIMSON, que même l'acquisition de The Great Deceiver et The Night Watch ne peuvent rendre obsolète de par sa valeur symbolique; l'année suivante, une compilation de la première vie de King Crimson sera publiée, et son principal intérêt sera une version de "I Talk To The Wind" chantée par Judy Dyble, la première chanteuse de Fairport Convention, assez plaisante au passage. (Waltersmoke - FP).


TRACKLIST:

A1Larks' Tongues In Aspic Part II6:45
A2Lament4:05
A3Exiles7:04
B1Asbury Park6:50
B2Easy Money6:32
B321st Century Schizoid Man7:32




Xymox - Twist Of Shadows



XYMOX - TWIST OF SHADOWS (1989)
Wing Records - 839 233-1 - (UK)

Je vais en rassurer quelques uns en chroniquant une des figures emblématiques de la scène gothique... Il est vrai que je suis ce groupe néerlandais depuis un certain temps déjà. Suivant leurs efforts discographiques, je me suis senti soit très touché par leur musique (l'albumMedusa, qui reste pour moi leur monument), soit très déçu... On a beaucoup parlé dans les revues spécialisées de la différence entre les périodes Clan Of Xymox et "Xymox" tout court, en caricaturant le trait entre les périodes intéressantes et les périodes sans inspirations. Je ne serai pas aussi catégorique car les albums période "Xymox" contiennent tout de même des morceaux auxquels on peut prêter attention, l'album Twist Of Shadows en est une preuve. Pour la petite histoire, cet album reste le plus vendu à ce jour par le groupe. 

Le premier exercice dans lequel il ne faut pas tomber pour ce disque est de le comparer au précédent. Les choses ont évolué au niveau du groupe, qui quitte le label 4AD et signe sur Polygram. Ronny Moorings, malgré les changements de line up incessants autour de lui, éclaircit l'ambiance générale de sa musique vers des horizons... plus electropop dirons-nous. On ne danse pas encore la tête béate et les fleurs en bandoulières tout de même. On passe du noir obscur au gris foncé si l'on veut y donner une palette de couleur caractéristique. Au moins la moitié des morceaux sortent nettement au dessus du lot, et je suis encore surpris de leur aspect intemporel comme l'instrumental majestueux "Clementina" qui clôt l'album sur une note aérienne et vaporeuse... Je vous conseille d'ailleurs le final aux accents de musique classique.

Parmi donc les titres à retenir, "Evelyn" débute magnifiquement l'album avec des claviers très présents, mais aussi une guitare aux envolées flamboyantes et une section rythmique carrée. "Obsession" est de même niveau avec Ronny en pleine forme, porté par une nuée de synthés pointilleux ou enveloppants. Seul le refrain peut paraître un poil convenu au niveau mélodique, mais qu'importe, car la fin de la chanson comprend des breaks technoïdes très travaillés. "Tonight" mérite aussi le détour avec ses percussions et ses notes de piano égrenées ça et là, ouvrant la place à une mélodie mélancolique soutenue par des cordes bienvenues et une guitare en perdition au loin... J'apprécie aussi "Imagination" aux chants féminins et au rythme entrainant. La guitare y claque enfin en riffs pendant que les synthés jouent une sarabande ensorceleuse... "... imagination keeps the shadows away...", imparable. Même avec les morceaux plus faibles, s'inspirant des mauvais aspects des groupes synthétiques des années 80, ce groupe avait encore, en 1989, une belle marge de manœuvre, mélangeant ses aspects les plus noirs et ses approches plus dansantes...La suite fut moins grandiose mais les Clan Of Xymox sont toujours présents et comptent bien poursuivre leur chemin musical bien particulier et original... (Foreth).



TRACKLIST :


A1Evelyn4:02
A2Obsession5:49
A3Craving5:41
A4Blind Hearts3:47
A5The River2:49
B1A Million Things3:52
B2Tonight5:19
B3Imagination5:04
B4In A City4:56
B5Clementina5:09