mercredi 30 avril 2014

The White Stripes - The White Stripes




THE WHITE STRIPES - THE WHITE STRIPES (1999)
Sympathy For The Record Industry ‎- SFTRI 577 - (Europe)




Haaa, The White Stripes, groupe en passe de rentrer dans la légende du rock (et ils le sont déjà si l’on en croit Philippe Manoeuvre de Rock n’Folk qui a classé « Elephant » parmi les 100 meilleurs albums de rock à posséder).

Beaucoup d’entre nous les ont découverts grâce à l’album cité précédemment (moi le premier d’ailleurs) et quelle claque ce fût ! Mais nous ne sommes pas ici pour s’intéresser à ce best seller, mais plutôt pour parler du début, du début de l’invasion de nos chaînes hi-fi par les 2 compères...

Il était une fois, en Amérique, pays du bon Rock n’ Roll, un couple de musiciens (enfin, Jack oui, Meg... pas encore !!). On pourrait imaginer la création des premiers titres assez facilement :

Jack : Hey, Meg, regarde ce que je t’ai ramené !! Une batterie !!
Meg : Heu... merci, mais je sais pas jouer !!
Jack : C’est pas grave, tape dessus, je prends ma guitare !
Meg : Bom, bam, boum, ding !!
Jack : Yeah, it rocks !!!!
Et voila !! Les Whites Stripes étaient nés !

Plus sérieusement, ce premier album éponyme est une révélation pour tous ceux qui ont eu la chance de les découvrir à cette époque. La musique est à la fois totalement dépouillée (une guitare, une batterie, une voix et de temps en temps des petites notes de piano...) mais remplit l’espace sonore a merveille et donne envie de secouer la tête dès les premières notes !

Le duo mélange de nombreux styles (punk, rock, blues...), le tout très électrifié !! Autant prévenir tout de suite, l’objectif de cet album n’est pas de reposer ! C’est du rock, pur et dur, avec des amplis poussés à 11, une batterie lourde et la voix éraillée si typique de Jack ! Le calme après la tempête sera pour « Get Behind Me Satan ».



L’album commence sur un titre hyper énergique qui donne le ton immédiatement : « Jimmy The Exploder », avec son riff entraînant et la batterie tout en roulement ! La suite est du même acabit, des morceaux enchaînés à la vitesse de l’éclair, un peu trop peu être (les chansons dépassent rarement les 2 minutes 30), plein de sueur et de Rock ’n Roll !

On pourra citer en exemple de morceaux très réussi « The big three kill my baby » un peu plus lent, mais vraiment entraînant, « When I hear my name », « Broken brucks » et « Slisjer drips » brûlots punk de la grande époque ou encore « Stop breaking down » et « Susy Lee » dans lesquels le bottleneck (élément typique du jeu des Whites Stripes) est mis en avant.

Les seuls moments où l’on repose nos oreilles (tout est relatif) de cette explosion de décibels sont « Sugar never tasted so good », titre sans grand intérêt, « Wasting my time », étoffé de petites notes aux relents de blues New-Yorkais du plus bel effet et « One more cup or coffee ». On imaginerait d’ailleurs facilement ces 2 titres dans la BO d’un film de Tarantino aux vues de l’ambiance qu’ils dégagent.

Dans cet album, malgré sa simplicité apparente, Jack nous fait déjà exposition de ses talents de musicien accompli (guitare slide, petits solos bien bluesy, notes de piano (à travers « St James Infirmary Blues ») et son chant purement dans l’esprit : c’est juste, c’est faux, on s’en fout, l’essentiel c’est que ça envoie !!!). Meg, elle, nous étale sa précision de métronome toute relative (c’est pour ça qu’on l’aime) !

De plus, on peut percevoir l’influence que les Whites Stripes peuvent avoir sur d’autres groupes, notamment « Do » dont le riff est quasiment identique à celui de « Are you gonna be my girl » de Jet ! Plagiat ?

Malgré cela, l’album, peut se révéler répétitif par moments, peut être un peu trop long (17 titres) et des chansons qui auraient mérités d’être légèrement rallongés (rooh, il sait pas ce qu’il veut lui....) ! Mais, finalement, est-ce que ce n’est pas ça qui fait leur charme ?

En conclusion, The White Stripes est un très bon album (surtout pour un premier), dans la plus pure tradition Rock n’ Roll des 70’s, avec ses petits défauts qui peuvent être perçus comme des qualités pour certains... A vous de juger !


TRACKLIST:

A1Jimmy The Exploder
A2Stop Breaking Down
A3Suzy Lee
A4Wasting My Time
A5Do
A6Cannon
A7Astro
B1Broken Bricks
B2When I Hear My Name
B3Screwdriver
B4Slicker Drips
B5Little People
B6St. James Infirmary Blues
B7I Fought Piranhas




Elton John - Captain Fantastic And The Brown Dirt



ELTON JOHN - CAPTAIN FANTASTIC AND THE BROWN DIRT (1975)
DJM Records  - 503011 - (France)

Ce nouveau chef-d'oeuvre d'Elton et Bernie parait dans un contexte un peu particulier. D'abord, contrairement aux disques précédents, il n'a pas été écrit et enregistré durant une poignée de jours, non cette fois-ci, tout le processus aura nécessité un bon mois. Allons allons, pourrait-on dire moqueusement, il y a du relâchement là, Elton ! Pensez un peu, un mois pour écrire un disque, c'est ridicule, surtout quand on sait qu'il faut des années à d'autres... Oui mais voilà, il faut savoir qu'à l'époque, notre visage pâle aux yeux cerclés d'écailles traversait une petite période de dépression et je suis prêt à fusiller -du regard- celui qui dit "Quoi, il a tout pour être heureux et il déprime ?" D'ailleurs, au moment de la sortie de l'album, il a ressenti le besoin de mettre en congé longue durée deux de ses fidèles accompagnateurs, le batteur Nigel Olsson et le bassiste Dee Murray. C'est le dernier album où on peut les entendre avec le reste du groupe "classique" d'Elton, et on verra que les autres ne feront pas non plus long feu pour parler vulgairement.

Quoiqu'il en soit, on assiste là à la dernière production du groupe mythique, et il est d'autant plus amusant de constater que c'est un disque qui a été réalisé en misant sur tout le potentiel des cinq musiciens, sans presque aucun apport extérieur. Pas de cuivres ni de cordes, à part un soupçon d'arrangements orchestraux sur "Tell Me When the Whistle Blows", il n'a pu s'en empêcher le bougre. Quoiqu'il en soit, lui-même considère que c'est son meilleur album, dénué d'effets tendant à le rendre plus "commercial". Il est sans doute son plus personnel aussi, en partage avec Bernie Taupin puisque les paroles leur servent à tous les deux d'autobiographie, ciblée sur leurs débuts de 1967 à 1969 : Captain Fantastic, c'est Elton et The Brown Dirt Cowboy c'est Bernie. Le plus bel exemple de ce concept est et restera "Someone Saved My Life Tonight", où Elton chante son désarroi de 1969, en proie à un mariage désastreux et qui l'a poussé à la tentative de suicide. C'est le chanteur canadien Long John Baldry, le fameux "someone" qui l'a sauvé, le convainquant de miser sur sa carrière musicale avant tout, et c'est ainsi qu'il est resté pour nous conter toutes ces belles choses.

Musicalement, Captain Fantastic and the Brown Dirt Cowboy ne sort pas des sentiers battus par rapport à tout ce qu'Elton nous a déjà proposés. C'est une suite de chansons rock, tantôt élancées, tantôt jouées en mode ballades. Le fait est que sans le concours de musiciens additionnels, cuivres ou orchestre, même un morceau bien rentre-dedans comme "(Gotta Get a) Meal Ticket" arrive à sonner plus fin que d'habitude et on sent que pour toutes les chansons, le groupe laisse une plus grande part à sa créativité qu'avant. En résulte une suite de chansons plus réfléchies, chargées de paroles encore plus significatives. On ne peut pas parler de rock progressif proprement, mais certaines chansons sont bien étirées en longueur, sans pour autant faire preuve de grande audace musicale. Peu importe, tout est beau et c'est le principal.

Ainsi, les guitares acoustiques façon country et la mandoline du morceau-titre nous prennent à la gorge dès les premières mesures. On se dit : cet album va être bon. On repense à Tumbleweed Connection, à "Slave" et bien d'autres ambiances de ce style. La chanson se densifie et ne perd rien de son teint éclatant, bien soutenue par les guitares, la rythmique et les congas de Ray Cooper. On ne va pas détailler tous les morceaux, mais il s'avère que chacun possède un charme fou dans son propre style, sans se ressembler vraiment entre eux. "Bitter Fingers" continue dans une esthétique resplendissante avec notamment cette très jolie intro virevoltante au piano, et ces passages d'un rythme ternaire à un binaire. "Tell Me When the Whistle Blows" a cette atmosphère mi-funk mi-classique, ce qui la rend particulièrement attirante (sans parler du solo de Davey Johnstone). "(Gotta Get a) Meal Ticket" rocks un max, "Writing" et "Better Off Dead" sont deux splendides respirations, jouée presque latino pour la première, la seconde étant plus folk avec piano électrique et percussions scintillantes.

Même les ballades sont différentes, possédant leurs atouts respectifs. "Tower of Babel" prend vite un ton rock, tandis que "We All Fall in Love Sometimes" mise sur un arrangement savant de claviers, piano, clavecin (qu'on n'avait pas entendu depuis le deuxième album) et mellotron à l'appui. "Curtains" et ses cloches solennelles terminent le disque avec une attitude plus sombre et torturée, en directe relation avec l'humeur d'Elton à l'époque, mais magistrale. Mais la plus belle reste évidemment "Someone Saved My Life Tonight", fragile, avec ce ton rêveur de bout en bout, une fin en apesanteur et un Elton on-ne-peut plus émouvant. Directement à classer (comme tout le reste de l'album d'ailleurs) parmi tout ce que lui et Bernie ont écrit de meilleur.

Le "finest" d'Elton est ainsi un album intemporel, qu'il convient de savourer comme du petit lait. Certains disent qu'il ne fera plus jamais aussi bien par la suite, ça reste à voir.


TRACKLIST:


A1Captain Fantastic And The Brown Dirt Cowboy
A2Tower Of Babel
A3Bitter Fingers
A4Tell Me When The Whistle Blows
A5Someone Saved My Life Tonight
B1(Gotta Get A) Meal Ticket
B2Better Off Dead
B3Writing
B4We All Fall In Love Sometimes
B5Curtains





Michael Jackson - Off The Wall



MICHAEL JACKSON - OFF THE WALL (1979)
Epic - EPC 83468 - (Europe)

Peut-être l’album le moins connu de Michael Jackson, Off The Wall n’est pas pour autant le moins intéressant, bien au contraire.
Cet album se démarque clairement des suivants, qui tournent dans un registre pop aux sonorités 80’s très (trop ?) envahissantes.
On a droit ici à un funk bien puissant que ne renierait pas Earth Wind and Fire.

Dès l’entame de l’album, l’intro de « Don’t Stop ‘Til You Get Enough » nous tombe dessus, avec toute sa pléiade de cuivres et de violons et son rythme effréné, qui dure tout le long de la chanson, soutenu par le chant de Michael Jackson, qui même s’il n’est pas exceptionnel, est très rythmé et suffisamment varié pour ne pas lasser l’auditeur.
Cette chanson reste encore aujourd’hui un classique, figurant sur bon nombre de best-of du chanteur, en tant que meilleur témoignage du début de sa carrière et tout simplement comme une des meilleures compositions écrites par le bonhomme.
L’album n’a pas toujours la même intensité, mais retrouve des pics égaux à cette première chanson, avec « Workin’ Day And Night » et « Get On The Floor », menées elles aussi à un train d’enfer.
Le reste est globalement plus calme, mais toujours assez rythmé (funk oblige), comme le prouvent les tubes « Rock With You » et « Off The Wall », ou même les morceaux les plus calmes comme « Girlfriend ». (originellement écrite par Paul McCartney)

Les 10 chansons qui constituent Off The Wall s’enchaînent presque à merveille. Presque, car il aurait été judicieux de séparer les trois chansons les plus calmes (« Girfriend », « She’s Out of My Life » et « I Can’t Help It ») qui sont toutes les trois les unes à la suites des autres.
Sinon, il n’y a pas grande chose à reprocher à cet album. Ses points forts sont une instrumentation parfaite, notamment la basse omniprésente, qui fait plus qu’accompagner « bêtement » les morceaux et propose quelque chose de plus (funk oblige toujours), mais aussi et surtout le chant, qui « vit » avec la musique, (on pourrait parfois le comparer à un instrument rythmique) et qui nous gratifie de quelques refrains imparables qui se greffent dans la mémoire après une seule écoute.

Bref tous les ingrédients d’un bon album de funk sont présents et tout amateur de ce style devrait y trouver son compte.
Michael Jackson a fait ici quasiment un sans faute avec ce premier essai. Toutes les chansons valent le détour (mise à part peut-être « She’s Out of My Life », un peu trop banale) et n’ont rien à envier à tout ce qui a pu déjà être composé à l’époque par les plus grands.
Les plus grands que Michael Jackson va s’empresser de vite aller rejoindre. (SEOSAMH - FP).


TRACKLIST:

A1Don't Stop 'Til You Get Enough6:02
A2Rock With You3:38
A3Working Day And Night5:12
A4Get On The Floor4:44
B1Off The Wall4:04
B2Girlfriend3:04
B3She's Out Of My Life3:36
B4I Can't Help It4:27
B5It's The Falling In Love3:46
B6Burn This Disco Out

3:38






Prince - Sign "O" The Times



PRINCE - SIGN 'O' THE TIMES (1987)
Paisley Park ‎- 925 577-1 - (Europe)

Nous voici donc en 1987, et Prince, désormais seul aux manettes, sort son nouvel album un an tout pile après Parade. Sign O' The Times : le disque de tous les classements, de toutes les discothèques idéales, de tous les superlatifs. Pourquoi une telle unanimité ?

Peut-être parce que Sign O' The Times est en réalité le “best of” de trois projets refusés par Warner, signant le début des bisbilles entre l’artiste et sa maison de disque : le double Dream Factory concocté en 1986 avec The Revolution, le side project Camille, alter égo féminin de Prince interprété par Prince lui-même et dont la voix est pitchée dans les aigus, et le triple Crystal Ball regroupant ces deux précédents projets en y ajoutant des nouveautés. Devant le refus de Warner de sortir un triple album, Prince n’a d’autre choix que de le réduire à un double. Il conserve 15 titres triés sur le volet du projet Crystal Ball, et enregistre un duo avec Sheena Easton. Ça donnera le 16ème titre, “U Got The Look”.

Peut être parce que Sign O' The Times est aussi un album somme. Un véritable catalogue de genres musicaux, retraçant trente ans de musique populaire tout en se payant le luxe d’être novateur. C’est bien simple, tout y passe :

- de la soul à la Curtis Mayfield ? “Slow love” et “Adore”. Check.
- de la ritournelle pop à la Beatles ? “Starfish and Coffee” et “Strange Relationship”. Check.
- un petit hommage jazzy à Joni Mitchell ? “The Ballad Of Dorothy Parker”. Check.
- du funk robotique façon Herbie ? “It” et “Hot Thing”, deux techno-funk minimalistes avec une grosse louche de sexe pour faire bonne mesure. Check.
- du blues 21eme siècle ? “Forever In My Life”. Avec en plus, une petite subtilité qui en fait tout le sel : les chœurs sont constamment en avance sur ce que prononce le lead. Inversion des rôles. Check.
- du rock à guitare virant hymne de stade ? “I Could Never Take The Place of Your Man”, mais surtout “The Cross” qui démarre dans un quasi silence pour terminer en explosion de guitares (on en fait des belles choses avec un Mi et un La…). Check.
- de la pop efficace calibrée charts ? “U Got The Look”. Check.
- du jam funk festif ? “It’s Gonna Be A Beautiful Night”, premier titre live paru officiellement sur disque, et c’est en France que cela a été capturé (Paris 1986) ! Check.

Peut être enfin parce que Sign O' The Times possède en son sein de véritables osnis (objets sonores non identifiés) - enfin, des trucs encore plus bizarres que le reste du disque, pour être exact. Des titres qui font que cet album est définitivement ailleurs et écrase forcément la concurrence de l’époque.

Commençons par le titre qui ouvre l’album et donne son nom à cet opus, je veux bien sûr parler de “Sign O' The Times”. Un beat de Linn Drum, des percussions synthétiques, et ce “Oh yeah” qui résonne comme une invitation. Et là, Prince nous envoie sa chanson la plus politique depuis un bail. Prince devient, le temps d’un titre, un Dylan funk, évoquant tour à tour le sida, l’explosion de Challenger, les homeless, la drogue… Dance on man ! Sur ce rythme robotique, une guitare se balade, comme autant de ponctuations d’un discours désabusé. Cette guitare se fera hargneuse dans les versions live. La chronique du déclin du rêve américain.

Deuxième ovni, “Housequake”. Mais c’est quoi, ça ! C’est funk, c’est jazz, et ça renvoie le rap naissant à ses chères études. C’est autre chose, on ne sait pas quoi, mais c’est unique. Ce titre, c’est l’essence de Prince. Un morceau qui est toujours d’actualité, vingt cinq ans après sa sortie.

Enfin, troisième morceau d’exception, le troublant “If I Was Your Girlfriend”, attribué à Camille. Drôle de morceau construit sur une basse slappée sur fond de nappe synthétique, un beat de Linn Drum et un motif mélodique au clavier doté d’un son d’accordéon. Et les voix de Prince, la lead étant pitchée dans les aigus alors que les chœurs étant pitchés dans les graves. De tant d’artifices devrait naître une certaine distance, mais c’est au contraire toute une humanité, toute une sensibilité étrange qui se dégage, les lyrics renforçant la confusion des sentiments et des genres.

Voila peut être pourquoi Sign O' The Times est, encore aujourd’hui, classé parmi les disques incontournables. Alors, doit on se féliciter du choix de la Warner d’avoir refusé les autres projets ? Au vu du résultat, on serait tenté de dire oui. Mais à la vérité, quand on connait les titres écartés - et qui sortiront quasiment tous dans les années qui suivront - Prince avait largement de quoi remplir un triple album qui tienne la route. Tout simplement parce que sa boulimie créatrice était sans limite durant cette période, et qu'il était intouchable, tout comme son modèle Stevie Wonder dominait outrageusement la musique entre 1972 et 1976. (Korama - FP).


TRACKLIST:

A1Sign "O" The Times5:02
A2Play In The Sunshine5:05
A3Housequake4:38
A4The Ballad Of Dorothy Parker4:04
B1It5:10
B2Starfish And Coffee2:51
B3Slow Love4:18
B4Hot Thing5:39
B5Forever In My Life3:38
C1U Got The Look3:58
C2If I Was Your Girlfriend4:54
C3Strange Relationship4:04
C4I Could Never Take The Place Of Your Man6:31
D1The Cross4:46
D2It's Gonna Be A Beautiful Night8:59
D3Adore6:29




Klaus Nomi - Klaus Nomi



KLAUS NOMI - KLAUS NOMI (1981)
RCA Victor - PL37556 ( France)

Qui se souvient encore de Klaus Nomi ? Depuis qu’il est remonté dans sa soucoupe, plus personne n’en parle. Plus personne n’écoute. Depuis que la lumière s’est éteinte et qu’il s’est définitivement envolé, plus personne ne parle. Même pas David Bowie, avec lequel il a pourtant flirté fut une période. Disparu comme il apparut il y a bientôt 30 ans. Mais pour qui, ce Nomi ?

Si le personnage devait vous être conté, comment devrait-on s’y prendre ? Peut-être par un mélange de new-wave minimaliste et d’opéra grandiloquent – mais peut-être pas. Par des allusions évidentes à la provocation et au SIDA – mais peut-être pas. Par une musique réduite à son expression la plus nue et la plus froide : synthétiseurs, bribes d’échantillons fanfarons sur des tonalités d’alliage glacé. Sonorités urbaines contemporaines (de l’époque), Klaus Nomi ne fit que prolonger la brèche ouverte par The Cure ou Depeche Mode ; mais à la voix qui ne tressaille pas, celle du baryton à celle du contre-ténor. Des octaves et des octaves de sueurs froides, l’objet demande des heures de recherche pour parvenir à toucher du bout du doigt toute la chaleur et la vitalité dont Klaus Nomi a pourtant inondé sa musique. Mais les ouvertures sont difficiles et rien ne paraît, au premier abord, aussi abscons que cet empilage-collage.

Avez-vous vu cette pochette ? Avez-vous déjà trouvé plus séduisant, repoussant et inquiétant à la fois ? Certes, Sperber n’avait que peu de connaissances musicales. Il a dit durant des années avoir étudié au Conservatoire Philharmonique de Berlin (ce qu’on trouve encore aujourd’hui sur de nombreuses biographies !) alors que, s’il est prouvé qu’il y est déjà entré, c’était pour y travailler ponctuellement comme ouvreur… Rien pour lui, le Nomi. Seule la voix nue, et quelques études de Purcell. Dont il tirera d’ailleurs la plus belle de ses chansons : "Cold Song", dite aussi "Hommage à la Tombe 148". Digne pièce d’enterrement. Il semble cependant que son bagage fut suffisant pour faire une immense carrière obsolète. Il avait tout juste une folle idée de costume noir et blanc, avec épaulettes saillantes et maquillage à outrance. Mais malgré les similitudes, il n’avait pas le charisme de James Brown. A défaut d’être Mr. Dynamite, il sera Mr. Domino.

Après tout, Klaus Nomi était avant tout un interprète de talent. "The Twist" sort du répertoire direct de Chubby Checker ("Let’s Twist Again" était par contre inattaquable). Klaus Nomi phagocyte, ingère, très lentement, et recrache une version lourde et lente, fortement concentrée, ressemblant davantage à une valse Rastafari qu’à une danse individuelle endiablée. Sa version du "Lightning Strikes" de Lou Christie paraît tout aussi malsaine que l’originale, sous couvert de proposition sexuelle indécente et de violence ironisée mais qu’on sent clairement exposée par la terminaison haut perchée – mais ce n’était peut-être pas si volontaire. Sperber avait le chic pour faire passer ses morceaux par des chemins de traverse qui ne leur convenaient pas. C’est ce qui leur donne toute leur grandeur. Un peu saisi, le Nomi.

Et quand il se met à chanter "You Don’t Own Me", un excès de sensiblerie nous ferait presque passer ce morceau pour son "The Show Must Go On", mais peut-être n’est-ce pas le cas. Entendre Mr. Domino chanter sa jeunesse (qui ne pouvait que mal finir) donne une fois de plus un impact inattendu sur sa chanson. La fatalité avait du l’accompagner, et il est grisant de constater que sur les 10 morceaux de l’album, au moins 8 passeront à une postérité de fortune, à un statut de « mythe miteux », à déchaîner les ferveurs de trop peu d’amateurs. Je cherche toujours. Allez comprendre comment une personne avec un seul véritable album au compteur a pu séduire les amateurs de niaiserie synthétique, les drogués d’élitisme symphonique, les malades de musique avant-gardiste et les fans des années 80. Curieuse vie, ce Nomi.

Ce disque est comme Nomi, blanc et noir. Blanc ou noir. Peut-être était-ce le but à atteindre lors de l’éclipse totale qui a précédée Sa venue sur terre pour apporter son message. Peut-être trouverez-vous cela morose, mais peut-être pas. Peut-être trouverez-vous cela génial, mais peut-être pas. Ou peut-être trouverez-vous juste cela peut-être. Et c’est peut-être comme ça que s’apprécie se disque.


TRACKLIST:
A1Keys Of Life2:26
A2Lightning Strikes2:59
A3The Twist3:10
A4Nomi Song2:47
A5You Don't Own Me3:39
B1The Cold Song4:03
B2Wasting My Time4:16
B3Total Eclipse3:29
B4Nomi Chant1:53
B5Samson And Delilah (Aria)3:43