samedi 23 février 2013

R.E.M. - Murmur



R.E.M. - MURMUR (1983)


Il y a une expression qui dit "Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis", et que je trouve idiote (comme beaucoup d'expressions toutes faites), mais pas parfaitement parce qu'il faut reconnaitre qu'à certains moments elle peut s'appliquer. Comme quand un jeune amateur de musique fait des fixations, et décide de détester le R.E.M. toute première période, alors qu'il ne l'a que peu écouté (et qu'il en aime certaines chansons). Peut-être était-ce dû à sa déception du fait qu'il croyait cette période très acoustique, typiquement folk et qu'au final Mumur, l'objet de tout le dédain se révèle être du rock héritier du punk et de la pop, à la rythmique assez redondante. Le temps a passé depuis, et notre jeune pousse décide de redonner une chance à ce "vieux R.E.M.". Au final, il ne l'appréciera pas autant que celui des plus grands succès, mais suffisamment malgré tout, le vent a donc tourné.

Pour ce premier vrai album, R.E.M. s'est d'abord tourné vers le producteur réputé Stephen Hague, qui se révélait trop perfectionniste et dont les goûts assumaient plus volontairement la prise du pouvoir de la pop grand public que ceux du groupe. Ce dernier a demandé avec insistance à I.R.S. si Mitch Easter, l'alchimiste de leur premier EP Chronic Town, pouvait revenir, ce qui s'est produit. Ainsi, Murmur sonne grâce à Easter et son co-producteur Don Dixon, dans la lignée de l'EP, en moins touffu et nettement plus clair. On parle de "guitares carillonantes" à propos du travail de Buck (très proche des Byrds), la basse Rickenbaker de Mills archi-mélodique est très en avant, et contrairement aux canons de la pop, R.E.M. ne fait pas forcément du chant le centre de la musique, en témoignent le nombre de fois où Stipe murmure presque, accentuant la dose de mystère de ses textes.

Les chansons n'avaient pas besoin d'être de nouveaux OVNIs pour révéler leur potentiel, mais avec une telle répétition d'idées dont j'ai parlé plus haut (rythmique, riffs...), un peu de corsé permet d'offrir une identité plus forte à chacune de ces perles. Par exemple, un morceau un peu moins original comme "Sitting Still" se verra transporté très haut grâce au chant de Michael Stipe, plus affirmé qu'ailleurs dans l'album, et aux choeurs sur le refrain. Le groupe ne voulait aucun solo de guitare ni aucun synthé, par égard pour Stephen Hague. A la place, il a mis des percussions lourdes ou légères, donnant encore plus de relief à ce rock déjà lumineux. On note en particulier du vibraphone sur "Pilgrimage", des effets clinquants et claquants, ainsi que d'autres joyeusetés disséminées ça et là. Les voix multiples de "9-9", les circonvolutions du refrain de "Perfect Circle", le piano (joué par Mike Mills) de "Radio Free Europe" et "Shaking Through", le violoncelle(-mellotron ?) de "Talk About the Passion", entre beaucoup d'autres en font aussi partie.

Murmur est, dans la continuité de Chronic Town, un objet sonore capable d'user des pointes d'inventivité tout en permettant à cette musique de conserver un grand élan de simplicité, par opposition aux excès de l'époque. "Radio Free Europe" en est le parfait exemple (version plus lente que le single d'origine, de même que "Sitting Still"), elle a beau mettre le paquet lors du pont avec son piano et ses percus, sa guitare acoustique ne fait pas dans la débauche. C'est l'une des chansons les plus efficaces de l'album avec "Shaking Through" (remarquez la coda qui n'a strictement rien à voir avec le reste), "Catapult" où la basse et les percussions métalliques sont lancées comme des pierres (en dépit d'un refrain bateau), "Laughing" et son reggae-rock puissant, "West of the Fields" son orgue et sa batterie-coup de poing, ou encore ma préférée, "Talk About the Passion" (ah, ces choeurs fantômatiques de Mills)... R.E.M. choisit aussi de tenter l'exercice ballade, avec un "Perfect Circle" très classieux et un "We Walk" où Stipe prend des intonations amusantes, toutes deux dans un style folk à l'ancienne.

Murmur, en plus d'être le premier vrai grand opus d'R.E.M., est tellement adulé que de nombreux fans se sont insurgés contre le projet de démolition du pont que l'on voit sur le verso de la pochette, au début des années 2000. La municipalité d'Athens a voté en faveur du public, et Georgia Railroad a été renommé Murmur Trestle... Vraiment attachant, comme cette musique. (Marco Stivell - FP).


TRACKLIST :

A1Radio Free Europe4:05
A2Pilgrimage4:25
A3Laughing3:52
A4Talk About The Passion3:22
A5Moral Kiosk3:32
A6Perfect Circle3:23
B1Catapult3:54
B2Sitting Still3:07
B39 - 93:02
B4Shaking Through4:00
B5We Walk3:04
B6West Of The Fields3:15





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