TEARS FOR FEARS - THE HURTING (1983)
Bien qu'ayant
lancé de manière assez fulgurante la carrière de Tears for Fears en
Grande-Bretagne en devenant disque de platine avec trois singles dans le top
five britannique, "The hurting" a longtemps été quelque peu écrasé
internationalement par le succès fracassant du hit "Shout" deux ans
plus tard. Je dois confesser moi-même l'avoir négligé à tort trop longtemps en
l'écoutant à l'ombre du second. Et pourtant, la maîtrise dont font déjà preuve
Roland Orzabal et Curt Smith est impressionnante, non seulement en termes de
mélodie mais également d'écriture. Tout d'abord, avec un recul salutaire, ce
premier essai est plus cohérent musicalement en ne proposant que de bonnes
choses là où le successeur oscille entre l'excellence et une ou deux belles
bouses. Ensuite, au niveau vocal, il témoigne d'une complicité quasi
fusionnelle entre les deux jeunes gens alors que par la suite, le timbre de
Orzabal joue l'assurance grave face à la mélancolie gentille de Smith, un peu
comme Dave Gahan et Martin Gore au sein de Depeche Mode. Rien de tout ça ici,
pas de véritable dualité mais plutôt une complémentarité. Et la musique ? Je
pourrais me contenter de vous renvoyer à l'écoute des brûlots que sont
"Mad world", "Pale shelter" , "The prisoner" ou
"The hurting" mais ce ne serait pas rendre justice à ce disque.
J'ignore pourquoi mais leur musique a souvent été qualifiée de synthie pop
alors qu'en réalité, elle me paraît osciller plutôt dans la veine de Echo and
the Bunnymen ("Watch me bleed", 'Change') ou Teardrop Explodes, avec
des machines certes mais pas dans l'optique de Depeche Mode ou Gary Numan par
exemple. Oui, "Suffer the children" évoque volontiers Howard Jones
mais de manière plus inquiète dans le feeling, oui, on y retrouve des synthés,
des boîtes à rythmes mais également de la guitare, de la basse. Les chansons de
Tears for Fears sont bourrées d'émotion, c'est comme ça, des émotions
volontiers grises et tristes mais également sincères et belles. On sent
pourtant un véritable travail sur les sonorités elles-mêmes, les deux Anglais
ne se contentant pas d'utiliser un arsenal de base ; écoutez les percussions de
"The hurting" ou "Ideas as opiates", les glissés de basse
de 'Change', les synthés de "The prisoner", voilà qui confirme que
ces deux-là ne sont pas de simples artistes pop même s'ils savent en capter les
saveurs dans leurs mélodies. Notons aussi que les compositions alternent entre
rythmes et passages plus intimistes sans la moindre mièvrerie ; Tears for Fears
démontrent encore cette capacité qu'ils perdront par la suite, contrairement à
Depeche Mode. "The hurting" n'est donc pas si naïf qu'on pourrait le
croire ; certes, la production de "Songs from the big chair" est en
béton armé mais ces premiers enregistrements révèlent un doigté d'artisan. A y
bien songer, ce ne serait pas celui-ci, leur meilleur album ? Après écoute du
sombre "The prisoner", du mélancolique "Mad world" ou du
passionné "Pale sheleter"... Si ! (Twillight).
TRACKLIST:
A1 The Hurting
A2 Mad World
A3 Pale Shelter
A4 Ideas As Opiates
A5 Memories Fade
B1 Suffer The Children
B2 Watch Me Bleed
B3 Change
B4 The Prisoner
Ci-dessus Pochette de l'édition U.S.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire