ECHO & THE BUNNYMEN - HEAVEN UP HERE (1981)
Nous sommes en 1981, la new
wave atteint son apogée en termes d’affranchissement musical et de richesse
stylistique. Le synthétiseur est dorénavant incontournable pour qui veut être
in. Plus d’un an auparavant, Joy Division, grâce à l’impulsion de Martin Hannet,
injecta du synthé glacial à un rock qui l’était tout autant. Or ici, ne vous
attendez pas à entendre de l’ARP Odyssey à gogo pendant quarante minutes, car
ce sont bien deux guitares, une basse et la batterie qui sont au travail.
Que dire devant cette œuvre
alliant rythmique rock et arrières pensées dépressives ? Il faut comprendre
l’intérêt créatif de cet album. Nous sommes bien à Liverpool et non pas à
Manchester. Cependant, cette année-là précisément, le groupe rejoint - en
esprit - la liste cold wave puriste tant convoitée et consultable chez
l’huissier Maître Factory sur simple demande. Ceci prend musicalement forme
dans l’utilisation assez décalée des guitares. A la différence d’un Vini Reilly
(The Durutti Column) ultra supra technique, Will Sergeant malmène ses cordes de
façon artisanale, jouant davantage sur la panoplie de crissements et autres
bruitages électriques. Placés judicieusement dans l’espace sonore stéréo
(exemple : une guitare positionnée tout à gauche pour la séparer du reste des instruments),
on bascule dès lors du simple rock entêtant à une conviction ténébreuse.
Show of strenght reste ainsi
une réelle démonstration de force. C’est un titre d’ouverture parfaitement
choisi et dont on se lasse jamais tant l’accroche et la glace sont liées. With
a hip, tout comme It was a pleasure, A pleasure ou No dark things aurait tout
du tube européen, si seulement une atmosphère angoissante ne venait plomber
l’affaire... L’introduction quasi sidérale d’Over the wall sur une boîte à
rythmes sourde apparaît comme un clin d’œil à leur propre Echo, tandis qu’All
my colours infiltre la brèche humaine du groupe avec ces toms roulants et sa
flûte de pan dark blue.
Ce climat pesant, malgré une
belle frénésie, se creuse avec The disease, titre et sinistre à souhait. Des
vocalises lointaines rajoutent une contenance aérienne à une guitare rythmique
marbrée (son chorus à la Cure) et les arrangements en reverb se chargent du
reste.
Heaven up here est
paradoxalement le moins bon titre, malgré un Ian McCulloch tout aussi constant
dans le genre grave, mâle, dépressif, puissant : la grande classe, quoi. Ce
titre n’atteint pas la magie escomptée. Pour preuve, Turquoise days n’a pas
besoin d’une telle dépense d’énergie pour convaincre. D’un tempo lent et sans
ligne de basse qui tue, c’est une chanson de grande ampleur. Deux accords
dissonants sèchement lâchés suffisent à remporter l’adhésion cold wave !
L’album se termine ensuite sur l’immense All I want et sa rythmique haletante.
Sans mauvaise foi aucune,
cet album reste le plus froid, le plus entier, le plus rock mais aussi le plus
lointain des Bunnymen.
TRACKLIST :
A1 Show Of Strength
A2 With A Hip
A3 Over The Wall
A4 It Was A Pleasure
A5 A Promise
B1 Heaven Up Here
B2 The Disease
B3 All My Colours
B4 No Dark Things
B5 Turquoise Days
B6 All
I Want
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire