THE ROLLING STONES - GOATS HEAD SOUP (1973)
Rolling Stones Records - COC 59101 5 - (France)
Rolling Stones Records - COC 59101 5 - (France)
Beggars Banquet, Let it Bleed, Sticky Fingers et Exile on Main Street : l’une des plus belles séries d’albums jamais publiées par un groupe de musique populaire, un ensemble encore rehaussé grâce à la parution, au cœur de ce divin enchaînement, du fantastique live Get Yer Ya-Ya’s Out. Semblable en éclat aux quatre premiers disques de Led Zeppelin ou à l’apogée progressive de Pink Floyd, cet assortiment représente la quintessence de l’âge d’or du rock. Enfin affranchis de la comparaison permanente qui les rabaissait au rôle de faire-valoir des Beatles, les Stones se sont offert le globe et se sont embourgeoisés. Leur restait-il encore quelque chose à prouver ? Évidemment non. C’est bien dans cet état d’esprit-là qu’il faut aborder Goats Head Soup. Vagabonds célestes, ayant fui les impôts britanniques, chassés de France, méprisant les États-Unis, les Stones n’ont plus vraiment de patrie. Dans ces conditions, la Jamaïque est un endroit comme un autre pour enregistrer un album. Le grand cirque rock’n’roll débarque donc à Kingston fin 1972, rassemblant outre le pentagone sacré les membres de la Cour stonienne, comme Nicky Hopkins, Billy Preston, Ian Stewart, Bobby Keys, Jim Price, sans oublier le producteur Jimmy Miller. Jagger ne tarde pas à se languir des réceptions européennes, tandis que Richards découvre avec fascination le monde du reggae et du rocksteady, initiant là une longue passion des occidentaux pour cette île des Caraïbes.
Les Rolling Stones ont représenté jadis l’apogée d’une époque et d’un genre musical ; à la différence de leurs rivaux de Liverpool, ils n’ont pas été dévorés par la renommée et la mégalomanie. Mais ils ont été maintes fois confrontés à la médiocrité. Leurs débuts n’avaient pas le sel de leurs grandes années, comme s’il s’agissait d’un groupe différent. Goats Head Soup a légèrement la même saveur, celle d’un combo auparavant sublime et qui n’est plus que sympathique. L’album est celui d’excellents artisans du rock’n’roll, à l’expérience hors du commun dans la composition, l’écriture et l’exécution. Ce n’est pas un disque génial à proprement parler. C’est avec lui que les Stones sont plus ou moins rentrés dans le rang. L’incipit "Dancing With Mr. D" est certes sympathique, mais paraît bien pâle à l’aune de ses superbes prédécesseurs "Sympathy For the Devil", "Gimme Shelter", "Brown Sugar" et "Rocks Off". Le riff de Keith Richards, assez bien trouvé, est fade et sans intérêt lorsqu’on le mesure à ses homologues de Sticky Fingers. Il en va de même du reste de l’album. On se retrouve alors avec la problématique suivante : peut-on considérer une œuvre pour elle-même, sans se référer au reste de la discographie de ses créateurs ? Le point de vue sur Goats Head Soup, selon l’une ou l’autre de ces perspectives, n’est alors plus du tout le même.
Les Rolling Stones montrent toute l’étendue de leur savoir-faire au moyen de ces dix chansons, touchant à des genres très divers, comme le rock’n’roll nostalgique, le blues-rock des années 60, le funk, la soul, le folk… Il est aussi intéressant de noter que le seul morceau véritablement fameux de ce disque n’est autre que la sirupeuse ballade "Angie", l’un des titres les plus caricaturaux jamais écrits par Richards. Banale sans vraiment être insipide, cette chanson peut être vue comme une première compromission dans une carrière jusque-là sans concession, premier sacrifice au grand show-business, débutant une longue série qui culminera quelques années plus tard avec "Miss You". Le seul titre véritablement mémorable de l’album n’est pourtant pas celui-là. Il s’agit de la dernière piste, "Starfucker", renommée "Star Star" après une concession inévitable à la censure. Les paroles de Jagger versent dans la grossièreté facile, mais ce pastiche de Chuck Berry défie le temps et les modes, grâce à un refrain superbe, dans tous les sens du terme. La mécanique interne du quintette a rarement aussi bien fonctionné, et chacun joue son rôle avec précision et sûreté. "Starfucker" clôt idéalement un album qui n’a rien de mauvais, mais qui arrive trop tard dans une carrière qui a déjà dépassé son zénith. (Ulyssangus).
Les Rolling Stones ont représenté jadis l’apogée d’une époque et d’un genre musical ; à la différence de leurs rivaux de Liverpool, ils n’ont pas été dévorés par la renommée et la mégalomanie. Mais ils ont été maintes fois confrontés à la médiocrité. Leurs débuts n’avaient pas le sel de leurs grandes années, comme s’il s’agissait d’un groupe différent. Goats Head Soup a légèrement la même saveur, celle d’un combo auparavant sublime et qui n’est plus que sympathique. L’album est celui d’excellents artisans du rock’n’roll, à l’expérience hors du commun dans la composition, l’écriture et l’exécution. Ce n’est pas un disque génial à proprement parler. C’est avec lui que les Stones sont plus ou moins rentrés dans le rang. L’incipit "Dancing With Mr. D" est certes sympathique, mais paraît bien pâle à l’aune de ses superbes prédécesseurs "Sympathy For the Devil", "Gimme Shelter", "Brown Sugar" et "Rocks Off". Le riff de Keith Richards, assez bien trouvé, est fade et sans intérêt lorsqu’on le mesure à ses homologues de Sticky Fingers. Il en va de même du reste de l’album. On se retrouve alors avec la problématique suivante : peut-on considérer une œuvre pour elle-même, sans se référer au reste de la discographie de ses créateurs ? Le point de vue sur Goats Head Soup, selon l’une ou l’autre de ces perspectives, n’est alors plus du tout le même.
Les Rolling Stones montrent toute l’étendue de leur savoir-faire au moyen de ces dix chansons, touchant à des genres très divers, comme le rock’n’roll nostalgique, le blues-rock des années 60, le funk, la soul, le folk… Il est aussi intéressant de noter que le seul morceau véritablement fameux de ce disque n’est autre que la sirupeuse ballade "Angie", l’un des titres les plus caricaturaux jamais écrits par Richards. Banale sans vraiment être insipide, cette chanson peut être vue comme une première compromission dans une carrière jusque-là sans concession, premier sacrifice au grand show-business, débutant une longue série qui culminera quelques années plus tard avec "Miss You". Le seul titre véritablement mémorable de l’album n’est pourtant pas celui-là. Il s’agit de la dernière piste, "Starfucker", renommée "Star Star" après une concession inévitable à la censure. Les paroles de Jagger versent dans la grossièreté facile, mais ce pastiche de Chuck Berry défie le temps et les modes, grâce à un refrain superbe, dans tous les sens du terme. La mécanique interne du quintette a rarement aussi bien fonctionné, et chacun joue son rôle avec précision et sûreté. "Starfucker" clôt idéalement un album qui n’a rien de mauvais, mais qui arrive trop tard dans une carrière qui a déjà dépassé son zénith. (Ulyssangus).
TRACKLIST:
A1 | Dancing With Mr. D. | 4:52 | |
A2 | 100 Years Ago | 4:00 | |
A3 | Coming Down Again | 5:55 | |
A4 | Doo Doo Doo Doo Doo (Heartbreaker) | 3:27 | |
A5 | Angie | 4:31 | |
B1 | Silver Train | 4:25 | |
B2 | Hide Your Love | 4:10 | |
B3 | Winter | 5:30 | |
B4 | Can You Hear The Music | 5:32 | |
B5 | Star Star | 4:25 |
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