PLACEBO - PLACEBO (1996)
Elevator Music Ltd. - LPFLOORY2 - (United Kingdom)
Elevator Music Ltd. - LPFLOORY2 - (United Kingdom)
Il y a dix huit ans, ce premier Placebo déboulait dans nos oreilles pour changer la donne de la pop-rock. On était encore en pleine guégerre Oasis-Blur, les premiers cités ayant pris une certaine longueur d'avance avec le génial (What's The Story) Morning Glory, et l'horizon semblait bouché par ces deux mastodontes à côté desquels vivotaient tant bien que mal des challengers tels que Pulp ou Kula Shaker. Puis un beau jour débarqua ce groupe insolent au leader androgyne inimitable et à la musique aussi directe qu'émotionnellement chargée. Et la concurrence alla pleurer…
Rien que la pochette de ce premier album suffirait à générer un culte (c'est d'ailleurs le cas). Cette image dérangeante et familière, touchante et effrayante à la fois incarne on ne peut mieux l'univers personnel de Placebo à ce moment de sa carrière. Placebo attaque en effet son album et son auditeur par une agression, le martèlement de batterie puis le riff saccadé de "Come Home". Très direct, très précis, très "pan dans ta face"… Et juste après arrive ce développement ultra mélodique sur lequel la voix quasi-féminine du père Molko vient nous cueillir sans prévenir. Tout est dit, et pourtant tout ne fait que commencer. Le chant de Molko n'est pas encore aussi maîtrisé que sur les albums suivants mais il prend déjà aux tripes tant il est inhabituel : haut-perché, lyrique en diable, rageur… Combien de personnes n'ont pu croire à la première écoute qu'il s'agissait bien d'un homme derrière le micro ? Molko joue de plus énormément sur son ambiguïté sexuelle à cette époque et apparaît systématiquement maquillé voire habillé en femme dans les photos presse, ce qui associé aux excès en tout genre du chanteur condamnera le groupe à un classement d'office dans le glam. Mais si l'imagerie glam est bien présente, la musique n'a pourtant rien à voir avec du Poison.
Placebo pratique sur son premier album une pop-rock au spectre très large, qui ondule entre ambiance calme et morceaux diablement énergiques. Le déjà mentionné "Come Home", "36 Degrees", "Bruise Pristine" et "Nancy Boy" : voilà des compos qui sont bien plus heavy que les standards habituels de la pop. Le jeu de guitare de Molko -inspiré par Sonic Youth- sait en effet se faire très incisif, et le mur sonore de "Nancy Boy" couplé à un mid-tempo très lourd laissent des traces. "Bruise Pristine" remporte la palme du morceau le plus méchant, l'alternance riff/mélodie du couplet mettant merveilleusement en valeur la montée bien bœuf du refrain. On est loin du métal, mais on est également très loin de la pop gentillette de Coldplay ou R.E.M.. Les lignes de chant sont également particulièrement alambiquées, allant chercher des mélodies imprévues et apportant une dimension supplémentaire aux morceaux. La section rythmique est de plus totalement béton: Stefan Olsdal est un des meilleurs bassistes de la scène, et l'éphémère Robert Schultzberg est un batteur technique au jeu très sec, moins brouillon (mais aussi moins énergique) que son successeur Steve Hewitt. Autant dire que ça joue sérieusement.
L'autre facette de cet album, ce sont les compos calmes qui reposent l'auditeur entre chaque déferlante d'énergie. On retiendra "I Know", ballade semi-acoustique de toute beauté dans laquelle Molko brille de mille feux au chant : sa montée vertigineuse lors du refrain reste encore aujourd'hui un morceau de bravoure ! Les percussions comme le son de didjeridoo en fond lors des couplets rendent cette chanson extrêmement douce et réussie. "Hang On To Your IQ" est une compo de pure pop mélodique et on trouve en "Bionic" et "Lady Of The Flowers" des compos répétitives et hypnotiques réellement typiques de Placebo. On appréciera leur côté contemplatif ou on s'ennuiera ferme selon sa sensibilité… L'album se clôt sur deux instrumentaux très réussis: "Swallow", son côté tribal et mélodique ainsi que sa voix enregistrée, et un morceau caché très joli en majeur bâti autour d'un piano inspiré et qui exprime un profond bien-être. Le contraste entre ce "générique de fin" tout happy et les thèmes abordés dans l'album, qui tournent autour du mal-être, de l'angoisse, du rejet et de la névrose est saisissant, et la musique elle-même est extrêmement apaisante.
Placebo n'a pas créé un tel buzz pour rien. Ce premier album est considéré par beaucoup comme leur meilleur encore aujourd'hui et il renferme un nombre impressionnant de qualités. Le son, l'énergie, le côté torturé et la sincérité évidente de la démarche ont su toucher un public qui a rapidement érigé le groupe en référence. Bouffés un temps par l'image envahissante de leur leader accro à la décadence médiatique (mais qui s'est bien calmé depuis), les Placebo ont souvent été réduits au statut de groupe à sensation qui choque aux dépends de leur musique. C'était une erreur, car ce premier album reste aujourd'hui une petite perle dans son genre. A posséder impérativement. (Les éternels).
TRACKLIST:
Rien que la pochette de ce premier album suffirait à générer un culte (c'est d'ailleurs le cas). Cette image dérangeante et familière, touchante et effrayante à la fois incarne on ne peut mieux l'univers personnel de Placebo à ce moment de sa carrière. Placebo attaque en effet son album et son auditeur par une agression, le martèlement de batterie puis le riff saccadé de "Come Home". Très direct, très précis, très "pan dans ta face"… Et juste après arrive ce développement ultra mélodique sur lequel la voix quasi-féminine du père Molko vient nous cueillir sans prévenir. Tout est dit, et pourtant tout ne fait que commencer. Le chant de Molko n'est pas encore aussi maîtrisé que sur les albums suivants mais il prend déjà aux tripes tant il est inhabituel : haut-perché, lyrique en diable, rageur… Combien de personnes n'ont pu croire à la première écoute qu'il s'agissait bien d'un homme derrière le micro ? Molko joue de plus énormément sur son ambiguïté sexuelle à cette époque et apparaît systématiquement maquillé voire habillé en femme dans les photos presse, ce qui associé aux excès en tout genre du chanteur condamnera le groupe à un classement d'office dans le glam. Mais si l'imagerie glam est bien présente, la musique n'a pourtant rien à voir avec du Poison.
Placebo pratique sur son premier album une pop-rock au spectre très large, qui ondule entre ambiance calme et morceaux diablement énergiques. Le déjà mentionné "Come Home", "36 Degrees", "Bruise Pristine" et "Nancy Boy" : voilà des compos qui sont bien plus heavy que les standards habituels de la pop. Le jeu de guitare de Molko -inspiré par Sonic Youth- sait en effet se faire très incisif, et le mur sonore de "Nancy Boy" couplé à un mid-tempo très lourd laissent des traces. "Bruise Pristine" remporte la palme du morceau le plus méchant, l'alternance riff/mélodie du couplet mettant merveilleusement en valeur la montée bien bœuf du refrain. On est loin du métal, mais on est également très loin de la pop gentillette de Coldplay ou R.E.M.. Les lignes de chant sont également particulièrement alambiquées, allant chercher des mélodies imprévues et apportant une dimension supplémentaire aux morceaux. La section rythmique est de plus totalement béton: Stefan Olsdal est un des meilleurs bassistes de la scène, et l'éphémère Robert Schultzberg est un batteur technique au jeu très sec, moins brouillon (mais aussi moins énergique) que son successeur Steve Hewitt. Autant dire que ça joue sérieusement.
L'autre facette de cet album, ce sont les compos calmes qui reposent l'auditeur entre chaque déferlante d'énergie. On retiendra "I Know", ballade semi-acoustique de toute beauté dans laquelle Molko brille de mille feux au chant : sa montée vertigineuse lors du refrain reste encore aujourd'hui un morceau de bravoure ! Les percussions comme le son de didjeridoo en fond lors des couplets rendent cette chanson extrêmement douce et réussie. "Hang On To Your IQ" est une compo de pure pop mélodique et on trouve en "Bionic" et "Lady Of The Flowers" des compos répétitives et hypnotiques réellement typiques de Placebo. On appréciera leur côté contemplatif ou on s'ennuiera ferme selon sa sensibilité… L'album se clôt sur deux instrumentaux très réussis: "Swallow", son côté tribal et mélodique ainsi que sa voix enregistrée, et un morceau caché très joli en majeur bâti autour d'un piano inspiré et qui exprime un profond bien-être. Le contraste entre ce "générique de fin" tout happy et les thèmes abordés dans l'album, qui tournent autour du mal-être, de l'angoisse, du rejet et de la névrose est saisissant, et la musique elle-même est extrêmement apaisante.
Placebo n'a pas créé un tel buzz pour rien. Ce premier album est considéré par beaucoup comme leur meilleur encore aujourd'hui et il renferme un nombre impressionnant de qualités. Le son, l'énergie, le côté torturé et la sincérité évidente de la démarche ont su toucher un public qui a rapidement érigé le groupe en référence. Bouffés un temps par l'image envahissante de leur leader accro à la décadence médiatique (mais qui s'est bien calmé depuis), les Placebo ont souvent été réduits au statut de groupe à sensation qui choque aux dépends de leur musique. C'était une erreur, car ce premier album reste aujourd'hui une petite perle dans son genre. A posséder impérativement. (Les éternels).
TRACKLIST:
A1 | Come Home | 5:09 |
A2 | Teenage Angst | 2:42 |
A3 | Bionic | 5:00 |
A4 | 36 Degrees | 3:05 |
A5 | Hang On To Your IQ | 5:13 |
B1 | Nancy Boy | 3:48 |
B2 | I Know | 4:44 |
B3 | Bruise Pristine | 3:35 |
B4 | Lady Of The Flowers | 4:47 |
B5 | Swallow | 22:24 |
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