SLADE - ALIVE (1971)
Polydor - 2480 094 - (France)
Polydor - 2480 094 - (France)
En 1971, apparaît dans les bacs une pochette rouge où l'on devine à peine des musiciens en pleine action, comme à la guerre. Comme si la pellicule avait été surexposée à cause de l'énergie déployée. C'est « Slade Alive ! ». Un disque qui fait date. C'est du brutal. Au diable les raffinements de « Angelina », les chœurs de « Dapple Rose », le violon de « Pity the Mother » ou les harmonies de « Pouk Hill ». Là, c'est du live, et on n'y va pas par quatre chemins, au contraire on fonce tête baissée, en véritable bourrin revendiqué.
Une basse ronde qui résonne, qui vagabonde d'un pas sûr et répétitif, un public apparemment déjà passablement excité, marquant le rythme en claquant des mains, une guitare arrivant en appui, pratiquement sur la pointe des pieds, avec un gimmick tournant. Calmement, un chant en duo débute. C'est une sorte de boogie intimiste, mais la tension augmente rapidement, la batterie se fait plus franche, les amplis crépitent. Dave Hill balance un chorus à l'arrache, ses collègues s'esclaffent : encourageant ou approuvant. Ils semblent rugir de plaisir au moment où l'on frôle un maelström sonique. Puis la basse roule des mécaniques, bouscule, gronde et prend les commandes, forçant la formation à clamer le jeu. Mais le public, galvanisé, continue à marquer le rythme de ses mains et le barrage cède : déferlement de trolls électriques.
Il s'agit en fait de « Hear Me Calling », une composition de Ten Years After (sur « Stonehenge »), que le combo a pris pour habitude de jouer pour ouvrir son set, en ayant pris soin d'épaissir le son et de lui donner un petit côté belliqueux.
On continue avec « In Like a Shot from my Gun », un inédit de Slade. Riff appuyé, guitares crues, batterie et basses brutales. La chant de Noddy Holder monte d'un cran dans la rugosité. On ne sait pas vraiment si c'est le public qui éructe, ou bien les musiciens, ou encore les deux. On se croirait dans une taverne des bas-fonds des Baskervilles ou d'une Cour des Miracles, où tous les reclus, les freaks et autres personnages fantastiques se donneraient rendez-vous pour ripailler et beugler tout ce qu'ils savent.
La reprise des Lovin' Spoonful, « Darling be Home Soon », permet à Holder de démontrer qu'il est bien plus qu'un hurleur (de talent). Il fait preuve ici de nuance, de sensibilité et .... de douceur (oui, malgré le fameux, mais douteux, rot salvateur).
- « Ouais, mais pas trop longtemps, heingue ? » vocifère en postillonnant Hébus le troll.
D'autant plus que cela commence à pousser derrière. Là où à l'origine, il y avait une section de cordes et de cuivres, il y a maintenant une bande de bourrins. Et pourtant ça sonne, la version de Joe Cocker fait même pâle figure en comparaison. Alors Noddy n'a pas d'autre alternative que de s'érailler le gosier sur les derniers couplets.
« Know Who You Are », qui n'est sans évoquer les Yardbirds, est la seule pièce à rester dans les clous, à rester proche de la version studio, marchant presque à l'économie, histoire de reprendre son souffle (ce qui ne l'empêchera pas de devenir une référence du Glam-rock), d'accumuler la pression, pour le dernier sprint final, la charge des barbares.
« Keep on Rockin' » c'est Jerry Lee Lewis, Little Richard et Ten Years After passés au mixeur. On épice le tout d'une voix aux cordes vocales entretenues au papier de verre et lubrifiées au Whisky-Guiness.
Slade se mue en centrale électrique.
« All right ev'ryboby !! » Blam ! « Let's you head down « Blam !! « Let's your heeeaaad down-aa-han » re-Blam !!
Et Noddy incite à foutre le bordel et beugle comme un hystérique : « I want to say ev'rybody get on off seat !! Claps your hands and stomp your feet ! Get down and get with iiit !!! ».
Et Noddy incite à foutre le bordel et beugle comme un hystérique : « I want to say ev'rybody get on off seat !! Claps your hands and stomp your feet ! Get down and get with iiit !!! ».
Le public suit illico, ce qui donne l'impression d'un tremblement de terre rythmé ; le groupe est transcendé et met le feu ! Holder semble insister sur « Stomp your feet », or justement, le « stomping » est une « danse » skinhead » consistant à lever haut la jambe et taper fort du pied pour marquer bruyamment le rythme.
Nolder, grand fan de Little Richard, se lâche totalement. On le sent électrisé, transcendé, sous l'emprise d'un Rock'n'Roll nerveux et torride. Comment ce gars peut-il chanter (vociférer ?) de cette façon sans se claquer une corde vocale ?
C'est une débauche d'énergie. Que le quatuor reste cohérent, tant chacun semble à la limite de faire une sortie de route, tient du miracle.
Et puis vient l'apocalypse. « Born to be wild » prend ici des allures de bête sauvage atteinte de la rage. A ce jour, aucun groupe, même de gros bourrins du manche, n'a su donner autant de violence, voire de démence, à cet hymne rock. Ce classique de Steppenwolf est ici pourvu d'un break, ou plutôt d'une furia sonore, bâti sur des larsens infernaux, une basse bombardier et des guitares épileptiques.
No overdubs ? Vraiment ? On ne s'en serait pas douté...
C'était quoi ça ? Du boogie ? Du Blues-rock ? Du Glam-rock ? Du Hard-rock ? Oui et non, en fait c'est juste Slade dans son élément.
C'est sauvage, crade et, hormis Jim Lea, les musiciens sont limités techniquement ; pourtant à l'époque cet album explose à la face d'un monde musical, pas encore perclus de carcans réducteurs, avec sa sauvagerie et sa débauche d'énergie (58 semaines dans les charts, en atteignant même la seconde place !). Un live séminal et spontané, enregistré devant des fans dans une petit salle (le Corman Theatre Studio). Un dirty rock'n'roll heavy qui semble avoir annoncé la scène australienne avec ses guitares rugueuses et la voix enrouée très hard-rock'n'roll, que l'on pourrait apparenter à d'autres voix fameuses des antipodes telle que celle de Bon Scott (5), de Jimmy Barnes et d'Angry Anderson.
C'est le début de la Slademania, et ce n'est pas grâce à leurs bobines, encore moins à leur tenues vestimentaires.
Les ambassadeurs du Glam-rock ? Ou les inventeurs ? Possible, mais pas dans le sens glitter. (Bruno - http://ledeblocnot.blogspot.fr/).
TRACKLIST:
TRACKLIST:
A1 | Hear Me Calling | 5:20 |
A2 | In Like A Shot From My Gun | 3:10 |
A3 | Darling Be Home Soon | 5:35 |
A4 | Know Who You Are | 3:30 |
B1 | Keep On Rocking | 6:20 |
B2 | Get Down With It | 5:15 |
B3 | Born To Be Wild | 7:10 |
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