KLAUS NOMI - KLAUS NOMI (1981)
RCA Victor - PL37556 ( France)
Qui se souvient encore de Klaus
Nomi ? Depuis qu’il est remonté dans sa soucoupe, plus personne n’en parle.
Plus personne n’écoute. Depuis que la lumière s’est éteinte et qu’il s’est
définitivement envolé, plus personne ne parle. Même pas David Bowie, avec
lequel il a pourtant flirté fut une période. Disparu comme il apparut il y a
bientôt 30 ans. Mais pour qui, ce Nomi ?
Si le personnage devait vous être
conté, comment devrait-on s’y prendre ? Peut-être par un mélange de new-wave
minimaliste et d’opéra grandiloquent – mais peut-être pas. Par des allusions
évidentes à la provocation et au SIDA – mais peut-être pas. Par une musique
réduite à son expression la plus nue et la plus froide : synthétiseurs, bribes
d’échantillons fanfarons sur des tonalités d’alliage glacé. Sonorités urbaines
contemporaines (de l’époque), Klaus Nomi ne fit que prolonger la brèche ouverte
par The Cure ou Depeche Mode ; mais à la voix qui ne tressaille pas, celle du
baryton à celle du contre-ténor. Des octaves et des octaves de sueurs froides,
l’objet demande des heures de recherche pour parvenir à toucher du bout du
doigt toute la chaleur et la vitalité dont Klaus Nomi a pourtant inondé sa
musique. Mais les ouvertures sont difficiles et rien ne paraît, au premier
abord, aussi abscons que cet empilage-collage.
Avez-vous vu cette pochette ?
Avez-vous déjà trouvé plus séduisant, repoussant et inquiétant à la fois ?
Certes, Sperber n’avait que peu de connaissances musicales. Il a dit durant des
années avoir étudié au Conservatoire Philharmonique de Berlin (ce qu’on trouve
encore aujourd’hui sur de nombreuses biographies !) alors que, s’il est prouvé
qu’il y est déjà entré, c’était pour y travailler ponctuellement comme ouvreur…
Rien pour lui, le Nomi. Seule la voix nue, et quelques études de Purcell. Dont
il tirera d’ailleurs la plus belle de ses chansons : "Cold Song",
dite aussi "Hommage à la Tombe 148". Digne pièce d’enterrement. Il
semble cependant que son bagage fut suffisant pour faire une immense carrière
obsolète. Il avait tout juste une folle idée de costume noir et blanc, avec
épaulettes saillantes et maquillage à outrance. Mais malgré les similitudes, il
n’avait pas le charisme de James Brown. A défaut d’être Mr. Dynamite, il sera
Mr. Domino.
Après tout, Klaus Nomi était avant
tout un interprète de talent. "The Twist" sort du répertoire direct
de Chubby Checker ("Let’s Twist Again" était par contre
inattaquable). Klaus Nomi phagocyte, ingère, très lentement, et recrache une
version lourde et lente, fortement concentrée, ressemblant davantage à une
valse Rastafari qu’à une danse individuelle endiablée. Sa version du
"Lightning Strikes" de Lou Christie paraît tout aussi malsaine que
l’originale, sous couvert de proposition sexuelle indécente et de violence
ironisée mais qu’on sent clairement exposée par la terminaison haut perchée –
mais ce n’était peut-être pas si volontaire. Sperber avait le chic pour faire
passer ses morceaux par des chemins de traverse qui ne leur convenaient pas.
C’est ce qui leur donne toute leur grandeur. Un peu saisi, le Nomi.
Et quand il se met à chanter
"You Don’t Own Me", un excès de sensiblerie nous ferait presque
passer ce morceau pour son "The Show Must Go On", mais peut-être
n’est-ce pas le cas. Entendre Mr. Domino chanter sa jeunesse (qui ne pouvait
que mal finir) donne une fois de plus un impact inattendu sur sa chanson. La
fatalité avait du l’accompagner, et il est grisant de constater que sur les 10
morceaux de l’album, au moins 8 passeront à une postérité de fortune, à un
statut de « mythe miteux », à déchaîner les ferveurs de trop peu d’amateurs. Je
cherche toujours. Allez comprendre comment une personne avec un seul véritable
album au compteur a pu séduire les amateurs de niaiserie synthétique, les
drogués d’élitisme symphonique, les malades de musique avant-gardiste et les
fans des années 80. Curieuse vie, ce Nomi.
Ce disque est comme Nomi, blanc
et noir. Blanc ou noir. Peut-être était-ce le but à atteindre lors de l’éclipse
totale qui a précédée Sa venue sur terre pour apporter son message. Peut-être
trouverez-vous cela morose, mais peut-être pas. Peut-être trouverez-vous cela
génial, mais peut-être pas. Ou peut-être trouverez-vous juste cela peut-être.
Et c’est peut-être comme ça que s’apprécie se disque.
TRACKLIST:
TRACKLIST:
A1 | Keys Of Life | 2:26 |
A2 | Lightning Strikes | 2:59 |
A3 | The Twist | 3:10 |
A4 | Nomi Song | 2:47 |
A5 | You Don't Own Me | 3:39 |
B1 | The Cold Song | 4:03 |
B2 | Wasting My Time | 4:16 |
B3 | Total Eclipse | 3:29 |
B4 | Nomi Chant | 1:53 |
B5 | Samson And Delilah (Aria) | 3:43 |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire